Stress post traumatique, une des conséquences du Covid 19
Auteurs(s) : Loan Nguyen
En quelques mois, le monde tel que nous le connaissions a changé. L’arrivée de la Pandémie du Covid 19 est pour ainsi dire « une nouvelle réalité désorganisée ». Il en découle alors des « traumas » tant sur les liens sociaux et familiaux que personnels.
Le traumatisme est l’ensemble des mécanismes de sauvegarde qui peut se mettre en place à la suite d’un ou plusieurs évènements, générant une charge émotionnelle non contrôlée et dépassant les ressources du patient. Du fait de l’apparition soudaine d’un virus inconnu de la médecine et qui est en plus, incontrôlable par le monde des humains, et qu’il n’y a pas de traitement pharmacologique adéquat, il en résulte une menace réelle qui est celle de la mort. De surcroît, cette impossibilité d’agir par manque de connaissance de la source virale, dépasse nos possibilités de réaction et nous plonge dans un registre de l’indicible. Cette expérience peut conduire à l’état de stress post traumatique.
Les malades hospitalisés brusquement, notamment en réanimation, sont confrontés au « réel de la mort », à une image de leur propre mort jusque là inimaginable et fait alors effraction dans le psychisme du patient. Cet évènement subi par le patient qui en ressent une vive atteinte affective et émotionnelle, met en jeu son équilibre psychologique et entraîne souvent des symptômes de type psychotique ou névrotique, ou diverses somatisations.
Les membres de la famille du malade souffrent en différé d’un mal être permanent suite à ce choc psychologique. La cause est en partie due à l’accumulation des tensions psychologiques ressenties, notamment l’accueil de soignants débordés et concentrés sur les malades en réanimation. En conséquence, ils ne se sentent ni rassurés ni écoutés par les soignants. Avec en plus, l’idée obsédante de ne pas pouvoir approcher et dire au revoir à l’être. Tout cela devient insupportable, allant jusqu’à l’évitement de tous les lieux qui rappellent l’hôpital, avec parfois des manifestations d’angoisse aux moindres bruits intrusifs, rappelant ceux d’une ambulance ou entendus en soins intensifs. Ce sont des symptômes d’un traumatisme psychologique.
Quant aux personnels soignants, qui ont eu à faire face aux décès de leur patients, ils ont connu différents syndromes traumatiques : cette Pandémie a conjugué plusieurs facteurs de stress, à cause du caractère particulièrement virulent du virus, capable d’endommager plusieurs fonctions vitales. Ils ont ainsi dû réaliser de nouvelles prises en charge, et face au manque d’encadrement, de matériel de protection, cela a engendré un sentiment d’impuissance et de trop plein.
Aussi, nous sommes dans une société où la communication est au coeur du fonctionnement social. Or la diffusion des informations médicalisées excessives et parfois contradictoires, à la télévision ou à la radio, parfois mal comprises du public, peuvent être la cause d’angoisses collectives.
La distanciation sociale et les gestes-barrières sont les seuls moyens concrets pour ne pas transmettre le virus : ils sont légitimes et fortement recommandés par le comité scientifique. Mais face au confinement, cela peut déclencher de l’anxiété, une peur de l’autre et de soi-même, potentiellement porteur d’une maladie : l’extérieur devient dangereux et insécure et la confiance envers l’autrui est ébranlée.
Le traumatisme réel a une origine exogène, ici il s’agit du Covid 19. Mais cet évènement par sa violence et sa soudaineté entraîne un état de sidération, conduisant les patients au désarroi.
Cependant, l’effet du Covid n’a pas de répercussion dramatique pour tous : certains ont une aptitude à la « résilience », c’est à dire une capacité de rebondir suite à un évènement traumatisant, pour d’autres cela révèle de la souffrance et ils développent alors des symptômes d’un état de stresse post traumatique: le patient revit à intervalles plus ou moins longs le moment traumatisant. Son sommeil est entrecoupé de visions cauchemardesques chargées d’émotion intense et peuvent être en proie à des crises d’angoisse aiguë. Des ruminations incessantes, avec la résurgence de phobies, d’obsessions, de troubles hypochondriaques, d’attaques de panique. L’ensemble de ces symptômes entraine l’altération du fonctionnement familial, social et professionnel. Ainsi le fonctionnement entier du patient peut être tourné vers le souvenir du traumatisme, et chargé d’empreintes et d’angoisse de mort.
Les complications du choc post traumatique peuvent apparaître comme un syndrome dépressif (tristesse, trouble de l’humeur, ralentissement psychomoteur, insomnie, perte intérêt pour toute activité, repli sur soi, etc....) et mener à des conduites addictives, ou à des idées suicidaires.
Dans ce cas de figure, il sera alors pertinent de prévoir une aide, un soutien psychologique visant à prévenir et atténuer les effets du trouble post traumatique sur le long terme.
Quelles sont les indications de suivi psychologique pour la prise en charge de stress post traumatique lié au Covid 19 ?
Les premiers temps, l’individu est le plus souvent anéantie, morcelée, aux prises avec des sentiments de honte, de culpabilité, de peur de la mort et parfois de haine violente. La parole ne peut être immédiatement interprétative. L’espace de travail du thérapeute se conçoit d’abord comme un contenant qui peut accueillir des affects et émotions violentes avant même d’envisager une réorganisation psychique. L’acte thérapeutique ne se réduit pas à une simple évacuation sommaire des faits mais en favoriser la remémoration et l’élaboration. Il est préférable qu’il y a un suivi d’une semaine à l’autre (voire plusieurs fois par semaine dans les premiers temps).
Il est nécessaire de pouvoir prendre le temps de revisiter toute la scène traumatique et les liens qui ne manquent pas de se nouer avec d’autres scènes traumatiques antérieures. En effet, ce qui traumatise n’est pas seulement le traumatisme au présent, repérable aujourd’hui mais aussi ce qu’il est venu révéler ou réactiver dans un effet d’après coup. Progressivement le délai entre les consultations pourra s’allonger et le thérapeute reprendre une technique classique.
Pour la plupart des patients, une douzaine d’entretiens suffisent sur une durée de un à six mois. Par contre, une désorganisation psychique massive peut nécessiter un suivi plus soutenu voire une hospitalisation.